L'EBE de 30 000 € dont tu parles n'est pas celui sur lequel il faut se baser pour évaluer la valeur d'une officine.
Il faut aller en amont et prendre l'
EBE retraité, aussi appelé
PCG (Performance Commerciale et de Gestion). Il s'agit de l'EBE auquel on réintègre les prélèvements du titulaire (et les cotisations sociales correspondantes). Tu connaitras ainsi les capacités contributives de l'officine, en faisant abstraction de la politique de prélèvement de son titulaire.
En cela, cet EBE retraité reflète la rentabilité réelle du bien, ce qui en fait la base de calcul la plus pertinente. Il est indispensable que ton expert-comptable te le calcule.
Il faut comprendre que peu importe le chiffre d'affaires, c'est la marge qui va impacter la rentabilité, donc l'EBE retraité. Ainsi, et tu l'as toi même relevé, ces 400 000 € de CA provenant de la vente des produits chers viennent (relativement) peu impacter la légitime base de calcul du prix.
En revanche, si tu penses que cette part de l'activité de l'officine est particulièrement fragile, alors il faut soustraire à l'EBE retraité
tout ou partie de la marge en valeur découlant de la vente de ces produits.
Car ce qui est à mon sens alarmant, c'est cette hausse de 40 % des produits chers en l'espace d'une année. Il faut bien identifier sa provenance.
Il serait bien dans l'intérêt du titulaire sortant que de maximiser par n'importe quel moyen (et souvent pas reproductible, c'est bien le problème) le C.A. et, à moindre mesure dans ce cas, la marge l'année de la cession afin de vendre le plus cher possible. Ne sois donc pas surpris s'il tient absolument à valoriser son officine en fonction de son C.A. Ne sois pas dupe !
En somme, il te faut quantifier la marge qui provient de la vente de produits chers, juger avec prudence de sa reproductibilité, et le cas échéant la retrancher de l'EBE retraité, seul indicateur qui doit te servir de base de calcul pour évaluer la valeur de l'officine et en négocier le prix.
A titre indicatif, une officine en France est vendue en moyenne 6,5 fois la valeur de son EBE retraité, selon les derniers chiffres d'Interfimo. En fonction, entre autres, de ton apport et de ta stratégie fiscale de reprise, tu fixeras facilement le multiple maximal de l'EBE retraité pour lequel tu peux viablement reprendre cette affaire.
Un dernier mot concernant le "black", car il faut être prudent.
D'une part parce que cette pratique ne doit pas être reproduite :)
Aussi, parce que ton titulaire peut te faire croire qu'il prélève 5000 € par mois, alors qu'il n'en prends "que" 2000, et te laisser mijoter un bon complément au cas où ta rémunération prévisionnelle est un peu juste. Tout ça dans le but de vendre plus cher !
Dans tous les cas, je te conseille de ne pas en tenir compte dans ta démarche.
Et, un bon conseil, si jamais l'affaire se fait et que tu en viens à reprendre non pas le fonds de commerce mais les titres de la société l'exploitant, fait figurer une clause de garantie d'actif et de passif dans l'acte de vente pour éviter de te voir reprocher a posteriori les pratiques illégales de ton prédécesseur.
Garde à l'esprit qu' "il vaut mieux rater une bonne affaire que d'en faire une mauvaise."
J'espère t'avoir été utile ;-)
Message édité par : PharmacienEntrepreneur / 28-01-2016 18:24