Cette crise ramènera le monde au bon sens. Avec trois choses élémentaires pour aborder l'avenir avec plus de sérénité et de sécurité.
La première porte sur les rendements. Ils ne peuvent être durablement supérieurs au taux de croissance des richesses produites. Certes, un investissement peut – sur un secteur particulier et pendant un laps de temps court – délivrer une rentabilité de rêve à plus de 15 %. Mais croire que ce rendement peut être durable relève de la naïveté ou, plus grave, de la complicité d'escroquerie.
La deuxième chose élémentaire, ce sont les limites de la gestion collective. Quand il s'est agi de produits simples et transparents, l'épargnant n'avait pas de raison de s'inquiéter. Mais quand on a commencé à lui proposer des «Sicav dynamiques au rendement supérieur grâce à une gestion de risque maîtrisée», il aurait dû s'émouvoir... La gestion collective a mis au point des produits hypersophistiqués dont le seul but était d'amortir et de dissimuler les risques. Elle a inventé d'appétissants mille-feuilles, mais qui ont conduit les fonds à la faillite et l'épargnant à la ruine. La gestion collective va devoir retrouver ses bases, sa simplicité, ses règles de prudence.
La troisième chose revient à ménager la responsabilité individuelle de l'épargnant. C'est à lui de mesurer ses risques en permanence. Il ne peut pas déléguer cette fonction à un opérateur dans lequel il n'a de toute façon plus confiance. Mais pour mesurer ses risques, il doit en être capable. Ce qui n'est pas garanti. Si l'épargnant se méfie à juste titre des produits collectifs, il va devoir se regrouper au sein d'associations de défense de l'épargnant. Les financiers de New York ou de Londres ont disjoncté parce qu'ils savaient contourner la réglementation, l'utiliser et même ils savaient déjouer les contrôles internes. Mais ils n'avaient aucun contre-pouvoir à l'extérieur de leur établissement. Le seul contre-pouvoir, c'est celui de l'épargnant. C'est d'ailleurs à lui de demander que les gendarmes des marchés fassent leur métier.
Le système financier n'a pas à faire de morale, il doit être performant et efficace, tandis que ses acteurs doivent avoir des comportements moraux et éthiques. Il faudra plus de bon sens, plus de régulation, moins de risques et plus de transparence. Un peu de morale en plus ne fera de mal à personne.
Mais en dehors d'une aversion sans doute historique au risque, que restera-t-il de la crise financière, puis de la tempête économique que nous traversons ? On nous dit, comme d'habitude dans de telles circonstances, que «rien ne sera plus comme avant», que les marchés fous des «dérivés» devront être encadrés... La crise pousse aussi à l'autocritique. N'a-t-on pas été «trop loin» (sous-entendu dans la voie de la spéculation) ? Les moralistes (qui abhorrent le risque) prennent leur revanche sur les cupides. Pour combien de temps, tout est là, car la cupidité est ancrée au fond de la psyché humaine.
Autant dire que le rebond aura lieu. Même si tous les placements à risques sont aujourd'hui vulnérables et sans visibilité. C'est vrai des actions, mais aussi des obligations, comme l'illustrent les taux d'intérêt astronomiques des émetteurs privés. C'est vrai aussi de l'immobilier, à ceci près que l'effondrement de la pierre papier n'est que le signe annonciateur de la lente baisse des prix de l'immobilier physique qui ne fait que commencer. C'est vrai, enfin, des matières premières, dont l'effondrement des cours a précédé la récession.
Alors que faire ? Il convient plus que jamais de répondre à la question de base : «Quel montant de mon patrimoine – 10, 20, 50 % – suis-je prêt à risquer en investissant sur des supports dont je ne connais pas d'avance la performance ?» Ensuite, il faut opérer un tri : d'un côté, les placements sans risque – livrets, épargne-logement, assurance vie en euros – et, de l'autre, tout ce qui reste. Y compris l'immobilier. Mais il faut éviter à tout prix de mélanger les genres comme le font les fonds à capital garanti ou les «profils» des contrats d'assurance vie. Troisième étape : identifier le type de risque qui convient à notre tempérament : notre appât du gain nous porte-t-il plutôt vers les obligations, vers les actions, vers les matières premières, vers l'immobilier ? Si aucun de ces «supports» ne vous ressemble, alors, de grâce, évitez tout placement à risques. Et, dans le cas contraire, professionnalisez-vous ! Vous n'en commettrez pas moins des erreurs, mais vous aurez aussi la satisfaction d'avoir fait quelques bons choix en toute connaissance de cause.
El Gringo