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damien-en-mer

Forum » » L'installation » » Hypothèse d'achat sans apport ou presque, réaliste ou non???


Posté : 16-11-2009 14:01 icone du post

(La valeur n'attend pas le nombre des années et on pourrait discuter longtemps pour savoir qui est le mieux placé sur ce genre de sujet entre celui qui a acheté une petite officine il y a 5 ou 10 ans et est confronté aux réalités de la gestion au quotidien et celui qui a étudié le rachat de plusieurs de ces officines dans le contexte actuel).

Chouette, un confrère de mon âge avec peu d'apport, qui aime les calculs et cherche une installation à la campagne. On a tout pour bien s'entendre, Canari
Ceci dit, tu as oublié 2 paramètres essentiels dans ton panorama chiffré des officines :
1. la baisse annuelle de la marge (on dit généralement entre 0,2 et 0,3 points - parfois mieux et parfois bien pire dans la réalité au hasard des réformes et des concurrents qui décident de casser les prix).
2. l'augmentation annuelle des charges externes et des salaires (on compte généralement 2%)

Sur 12 ans, si la croissance de ton CA ne compense pas ces deux paramètres, ce sont des centaines de milliers d'euros qui te manqueront pour rembourser ta banque (qui n'attendra pas 12 ans pour te le faire savoir). Si tu veux le vérifier, amuse-toi à faire varier tous les paramètres de ton prévisionnel en utilisant le fichier excel à télécharger sur le lien suivant : http://apab.asso-web.com/55+calcul-de-previsionnel.html

N'oublie pas non plus que si tu épuises d'entrée de jeu toutes tes marges de manoeuvre : faible rémunération, personnel minimum. D'où deux faiblesses majeures :
1. Tu n'as aucune capacité d'investissement pour mener des stratégies de développement.
2. Tu n'as aucune marge pour résister si un médecin n'est pas remplacé, ou par un confère à la main plus légère, ou si un employeur important du coin ferme, etc...
Exemple concret : j'ai récemment rencontré une titulaire qui a acheté il y a 6 ans une officine qui fait entre 800 et 900k€ annuels. Sur la base d'un prévisionnel à 3% de croissance annuelle (ce qui se faisait couramment à l'époque). Pas de problème au début : peu d'impôts (amortissements et intérêts d'emprunt au maximum) et croissance OK. Puis la croissance diminue, les déductions fiscales aussi et là ça coince... Pas d'erreur de gestion particulière de sa part. Juste la faute à pas de chance.

Sur la viabilité des petits CA, si tu pousses ton raisonnement, tu arriveras à départager les avis de Whoops et de pfc : si l'évolution de ton CA compense la baisse de ta marge et l'augmentation de tes charges, c'est gagné. Sinon, c'est cuit. Tout dépend de ton degré d'optimisme... jette quand même un oeil aux fiches de l'INSEE pour avoir une idée de l'évolution démographique du coin : population totale et structure en fonction de l'âge, car si la moitié de la population a déjà plus de 65 ans, l'avenir est un peu sombre à moyen terme.
Si ton CA n'évolue pas tandis que les charges et les salaires augmentent, ton EBE sera inexorablement rongé (assez vite, en fait) jusqu'à ce que ton officine permette tout juste de faire vivre un titulaire qui a fini de rembourser... puis même plus ce titulaire; C'est en ce sens que les petites officines des campagnes qui connaissent une hémorragie démographique sont effectivement appelées à disparaître, sauf revirement de la politique gouvernementale ou action syndicale efficace pour faire remonter les marges (on peut toujours rêver QUAND ON ESSAIE AU MOINS DE S'EN DONNER LES MOYENS, demandez aux médecins)
Donc, entièrement d'accord avec pfc quand il dit qu'il ne faudrait pas acheter ce genre d'affaire plus de 40 à 50 du CA, afin de garder des marges de manoeuvre et, faute de pouvoir capitaliser sur la valeur du fonds, de pouvoir au moins le faire sur ses revenus. Et entièrement d'accord avec Whoops quand il dit que cette question a maintes fois été traitée.

Enfin, concernant le CA /employé, on m'a proposé une officine qui fait 800k€ annuels avec pour seule employée depuis 20 ans une salariée mi-temps qui fait le ménage, du rangement et zéro comptoir. 9h20 de comptoir par jour 6 jours sur 7, zéro absence autorisée (ni matériellement possible d'ailleurs), mais ça existe.

Et un petit mot pour Marinela (sinon c'est pas drôle) : effectivement, quand on n'a que 30 ans et pas d'apport, on n'a pas peur de crocher dedans dans une campagne où personne ne veut aller, de ne pas compter ses heures, ses W-E ni ses vacances et de ne pas rechercher de rémunération extravagante. Mais pour le prix, on demande au moins de ne pas faire faillite au bout de 5 ans parce que la faute à pas de chance (ou d'être obligé de revendre la moitié de nos parts).


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